Mgr
d'Ornellas, archevêque de Rennes, travaillant les questions de bioéthique pour
la Conférence des évêques de France
Faut-il avoir peur du débat ? Certainement
pas ! Ces derniers mois ont montré à tous à quel point la faute politique est
grande de ne pas organiser le débat pour que chacun puisse s'exprimer, écouter
et réfléchir, en particulier sur les questions sociétales. Quand les
intelligences se rencontrent pour chercher ensemble la voie la plus juste du
progrès, elles se grandissent et reçoivent dans la paix la solution proposée.
Les États Généraux de la bioéthique en 2009 l'ont montré : ils ont permis un
vrai « dialogue » entre les composantes de la société.
Ce n'est pas sans raisons, solidement
établies, que ce débat de bioéthique s'est conclu en juillet 2011 par le
maintien dans la loi du principe d'interdiction de la recherche sur l'embryon
humain et sur les cellules souches embryonnaires.
Certains veulent aujourd'hui que cette
recherche soit autorisée, moyennant un encadrement. L'enjeu est majeur : avec
l'autorisation, pour la première fois dans notre droit, il serait légal
d'utiliser l'être humain ! C'est pourquoi, le législateur de 2011 a pensé
nécessaire de mettre dans la loi que tout changement législatif sur la
bioéthique devra être précédé d'un débat sous forme d'États Généraux. Le
législateur s'est ainsi montré confiant dans le débat organisé pour la société.
Pourquoi cet article de loi ne s'appliquerait-il pas à la recherche sur
l'embryon humain ? Pourquoi avoir peur du débat en confinant aujourd'hui
l'examen de cette question dans une soirée parlementaire ?
Consciente des enjeux sociétaux de la
bioéthique, l'Église catholique est toujours entrée dans le dialogue. Elle a
publié en 2009 ses « propos pour le dialogue » et ses « questions pour un
discernement ». Elle souhaite que le choix entre le principe d'interdiction et
l'autorisation encadrée à propos de la recherche sur l'embryon humain soit
l'objet d'un vrai débat qui conduise sereinement à une solution de progrès. Ce
débat ne doit pas être à la remorque d'intérêts particuliers.
Le progrès n'est vrai que si éthique et
science sont reliées. La science est nécessaire, avec ses voies de recherche :
les cellules iPS, les cellules souches adultes, la « conversion directe » des
cellules différentiées. L'éthique reconnaît que l'embryon humain « doit
bénéficier du respect lié à sa qualité », comme le souligne le Comité
Consultatif National d'Éthique, car il partage notre humanité : nul n'est une
personne sans avoir été d'abord un embryon humain ; nul ne devient humain qui
ne l'est pas.
Le principe d'interdiction de recherche sur
l'embryon humain alerte sur l'existence de cet écosystème humain. Ne pas le
respecter se retourne toujours, à plus ou moins longue échéance, contre nous.
La science ne peut guider les choix politiques. Ceux-ci doivent discerner
comment l'écosystème humain, qui précède l'État, est promu. L'écologie, si
nécessaire et urgente, est aussi humaine.
Mgr Pierre d'Ornellas
Archevêque de Rennes